semaine 27

Se noyer dans un bain de Monet 

Pérégrinations par Lucie Van de Walle, le 07 février 2020

Une immersion dans les tableaux de Monet, le choix de la séduction © Antoine Porcher

Je fais partie de ceux et celles qui préfèrent l’original à la copie, même lorsqu’elle est savamment habillée d’effets numériques. Afin d’éventuellement corriger cet a priori négatif, je me suis décidée à me rendre à l’exposition Claude Monet : The immersive experience . C’est un concept très à la mode que de bombarder les visiteurs de bordées d’images en mouvement de manière à les envelopper de formes, de tons et de couleurs venues de tableaux de maîtres, une manière - dit-on -  d’entrer dans l’oeuvre. Cette fois, ce sont celles de Claude Monet (1840-1926), le père et le représentant le plus illustre du mouvement impressionniste, expression consacrée par son célébrissime tableau  Impression, soleil levant (1874), que l’on aperçoit fugitivement (mais qui a eu le temps de l’identifier ?) dans le « show », puisqu’au final, c’est de cela qu’il s’agit. 

Cette exposition signée Exhibition Hub, une société apparemment basée à Bruxelles qui fabrique des événements picturaux « de classe mondiale »,  est installée dans la salle Horta de la Gare Centrale de Bruxelles. Un très bon choix en termes d’accessibilité, mais, selon moi, un lieu qui n’est pas assez spacieux pour, malgré les piliers qui barrent souvent la vue, offrir une vue à la fois variée et plus panoramique des images. Ni encore permettre une déambulation ludique comme l’autorisent, par exemple, les volumes de l’Atelier des Lumières à Paris. 

Le côté positif de tout cela est, par nos temps dominés par l’image et l’immédiateté, de donner à tous l’accès à des chefs-d’œuvre, toutes classes d’âge confondues. En revanche, il est vain d’imaginer pouvoir y nommer les choses, de les identifier, de les analyser, de laisser cheminer l’émotion. En fait, toutes ces choses qui accompagnent normalement une rencontre avec un tableau réel. 

Ceci compensant peut-être cela, Claude Monet : The immersive experience comporte aussi un aspect didactique où il est question de la vie de Monet, de ses voyages, de sa longue retraite à Giverny. Il y a donc des vues fixes genre cartes postales anciennes, qui montrent  Paris, Londres ou Venise, ainsi que des paysages de Hollande ou de Norvège où Monet a eu l’occasion d’entraîner son épouse et de poser son chevalet. Quant au résultat purement artistique de tout cela, il est plutôt décevant.  

Est-ce pour rendre les tableaux plus crédibles que l’on a fait s’échapper des libellules virtuelles depuis les étangs des « Nymphéas » ou bien voleter des papillons parmi les fleurs ? À un autre moment, les tableaux en série de la cathédrale de Rouen, sont tellement fondus les uns aux autres que quelqu’un de non averti ne peut finalement en distinguer aucun. Tout cela baigne dans une musique coulant comme de l’eau tiède, tel un fond sonore destiné à lisser ce qui ne l’aurait pas encore été, dans une exposition immersive qui manifestement a fait le choix de proposer une ambiance colorée - et de ce fait chaleureuse - mais sans autre véritable intérêt. À chacun de voir s’il peut s’en contenter. 

Claude Monet : The Immersive Experience  : Galerie Horta – rue du Marché Aux Herbes,  116, 1000 Bruxelles. Durée : 35 minutes en boucle. Tous les jours sauf le mardi. Jusqu’au 19 avril 2020.

Autres informations : https://www.expo-monet.be

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