L'anticommunisme primaire a survécu au mur
Edito par Jean Rebuffat, le 26 octobre 2018

Le poncif est aussi vieux que l'Humanité... Photo D.R.
Voici trente ans (en anticipant de quelques mois) que le mur de Berlin est tombé. Le communisme n'y a pas survécu, tout au moins sur le continent européen, et ailleurs, il se fait rare voire ultralibéral. Faut-il continuer à voir peur de l'extrême gauche? L'argument est systématique et on l'a entendu en 1981, lorsque Mitterrand a appelé au gouvernement des ministres communistes. Il ressort à présent en Belgique (1) et apparemment, le distinguo que nous avons souligné la semaine dernière n'a pas eu que des admirateurs. Au nom du MR, ce parti qui gouverne la Belgique avec les nationalistes flamands, Olivier Chastel se demande candidement si le PS et Écolo se rendent bien compte de ce que c'est, négocier avec des communistes.
Historiquement, la question vaut d'être posée. En Europe, là où le PC a été au pouvoir, on ne peut pas dire que la liberté a fleuri et que les idéaux ont abouti. Mais s'agit-il d'une malédiction consubstantielle ou circonstancielle? La démonstration reste à faire. Teinté de léninisme, le marxisme se base sur une théorie qui avait déjà trois quarts de siècle au temps de la révolution russe et si le soviétisme n'est pas éminemment sympathique, quelle chance a-t-on laissé aux idéaux? Et a contrario, le libéralisme n'a-t-il que des côtés fréquentables? N'a-t-il pas engendré des excès dont la dualisation de la société actuelle est un exemple évident?
Galvauder les leçons de l'histoire, c'est aussi dangereux que les ignorer. Personne n'a envie du goulag. Mais résumer le communisme par la répression et la pauvreté ou décrire les partis très à gauche comme un ramassis de totalitaires, le couteau entre les dents, c'est un peu comme prétendre que si la Méditerranée noie plein de migrants, c'est que leurs rafiots sont mal construits, et que s'il y a plein de pauvres dans nos rues, c'est parce qu'ils ne les traversent pas pour trouver du boulot... Olivier Chastel pense visiblement que les leçons de l'histoire sont vite oubliées: il attribue le succès d'Écolo au fait que les jeunes générations ne savent pas que les Verts ont déjà participé au pouvoir. Alors rafraîchissons lui la mémoire: tant en Belgique qu'en France, qu'en Italie, qu'au Portugal et qu'encore bien ailleurs, les communistes ont accédé au pouvoir et l'ont ensuite perdu. Comme, espérons-le, il n'est pas dit que l'axe NVA-MR restera trente ans aux affaires.
(1) Parce que dans quelques communes, le PS a parlé au PTB! Nonobstant que le dialogue se passe mal et que des arrière-pensées animent les deux parties, imagine-t-on qu'une demi-douzaine d'échevins, à Molenbeek, à Charleroi ou à Herstal, soient en mesure d'enclencher le Grand Soir?
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