semaine 20

Le domaine de la foi

Edito par Jean Rebuffat, le 20 novembre 2020

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L'affiche du film

En ce siècle où nous sommes, la patience n'est pas la vertu cardinale et le monde entier commence à trouver que cette année 2020 se traîne, entre confinement, déconfinement et reconfinement, en passant par les bulles plus ou moins larges, les attestations, les couvre-feu et les masques, sans omettre les visioconférences, le lavage des mains, les commerces fermés ou à moitié ouverts. L’œil sans cesse dirigé vers des statistiques, le citoyen lambda s'interroge: et alors, ce vaccin? Quand il n'est pas tenté par le fantasme, le complotisme, l'indifférence ou le cynisme. Terreau extrêmement fertile pour les fake news!

Celles-ci et ceux qui les diffusent ont pour eux une force qui est du domaine de la foi. Depuis quelques années, une des formes émergentes du journalisme a été ce qu'on appelle en jargon franglais le fact checking. Eh bien on aura beau en faire, démonter les mensonges, dépecer les rumeurs, décortiquer les amalgames, démolir les hypothèses branlantes et détailler les approximations, on ne convaincra pas ceux qui croient qu'on ne leur dit pas tout, qu'on les manipule et qu'il y a des buts cachés à toutes les mesures prises.

Bien entendu comme pour une religion, il peut y avoir parfois des raisons d'y croire! Mais il y a déjà assez à mettre en garde contre les possibles atteintes aux libertés publiques ou contre l'écart sans cesse grandissant que cette crise accentue encore entre nantis et démunis, entre riches et pauvres, entre travailleurs et sans-emploi, pour qu'on ne dérape pas comme il est constaté ces dernières semaines. Pour ne prendre que cet exemple, le film Hold up, dénoncé de toutes parts mais néanmoins plébiscité, mérite son titre: le complotisme est une bonne affaire, un fond de commerce fleurissant, qui trouve des donateurs comme une secte et qui fonctionne comme une religion. Et puisque la hâte d'en finir incite à croire que la crise sanitaire est longue (elle n'a pourtant que quelques mois), cette durée apparaît de plus en plus comme suspecte.

L'histoire nous apprend que ces périodes d'impatience, d'agacement, de doute, où le sentiment qu'il n'y a pas d'issue possible se mue en certitude, débouchent souvent sur des remises en question et sur des solutions tragiques – ou sur des révolutions. Il est en effet grand temps que le vaccin arrive si l'on veut éviter un monde où MM. Bolsonaro, Trump et Poutine risquent d'apparaître comme de grands démocrates et ouvrir la porte à un monde d'après où l'on aurait compris que ce n'est pas tant dans la gestion de la pandémie qu'on s'est mal pris mais plutôt dans l'exploitation de la planète et de la plus grande part de l'humanité.

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