Aux âmes bien nées, ...
Edito par Jean Rebuffat, le 22 février 2019

L'humour est la politesse du désespoir. Photo © Jean-Frédéric Hanssens
Y a-t-il un âge minimal pour se mêler des affaires du monde? Dans un nombre croissant de pays, de plus en plus d'étudiants, mineurs ou majeurs, font la grève des cours et manifestent pour pousser les autorités à prendre ou à appliquer enfin des mesures destinées à limiter les effets du dérèglement climatique. On entend bien sûr quelques sarcasmes relatifs au plaisir de ne pas aller au cours mais un peu comme on entend tout.e gréviste se faire traiter de fainéant.e. Il n'empêche que ce mouvement est très loin d'un effet de mode, qu'il reflète une prise de conscience grave (même s'il manifeste une bonne humeur ostentatoire dans ses manifestations) et qu'il pose inévitablement la question du sérieux de ses participants – une question d'ailleurs très générale dans nos sociétés contemporaines.
En mai 68, on assista à un déferlement des jeunes issus du baby boom; un effet de génération qui fit comprendre que placer l'âge de la majorité a vingt et un ans était trop tardif. Paradoxalement, cette génération, si prompte à renvoyer les vieilles lunes au musée, a elle-même manifesté par la suite un certain agacement vis-à-vis des demandes des générations suivantes...
En réalité, il n'y a pas d'âge pour être sage, ni dans un sens, ni dans l'autre. L'âge de la majorité, au fil des siècles, a fortement varié, tout comme l'âge de la nubilité. Le personnel politique, d'ordinaire, est plutôt d'âge mûr. C'est que dans la politique, on fait carrière et que cela prend du temps (un vrai cursus honorum, là aussi). Il a donc tendance à estimer que le manque d'expérience est rédhibitoire, alors qu'il faut bien commencer!
Donc à seize ans, une jeune Norvégienne à nattes pas plus haute qu'un mètre cinquante peut parfaitement avoir raison, être capable de mobiliser des foules et donner des leçons à ceux et à celles (plus récemment) qui ont tendance à penser que tout est difficile, que tout est compliqué et qui naviguent de moratoire en sursis ou de délais en renoncements. C'est plutôt réjouissant, en fait, de constater que très loin des clichés qui avaient déjà cours dans les golden sixties (les jeunes sont paresseux, l'école est nulle, ça nous prépare une belle pagaille), la jeunesse est consciente et organisée. Et d'un pacifisme remarquable. Car l'état de la planète mériterait bien une sainte colère. Reste à voir comment va se gérer l'évidente bipolarisation qui se dessine, entre la fin du monde et la fin du mois...
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