semaine 20

Joyeux Nouillel !

Pasta par Michel Noirret, le 23 décembre 2023

Dessin de Wich

Y a des écolos dont les oreilles ont des murs. Gilles Vanden Burre dans la Libre du 18/12/ nous informe qu’il préfère que les femmes qui portent le voile soient sur le marché du travail plutôt que coincées chez elles.
Il n’a manifestement pas entendu, qu’en tout cas dans l’administration, c’est lorsqu’elles sont en contact avec le public que ça pose problème.
Mais, bah ! L’essentiel, c’est qu’elle soit sur « le marché du travail ». L’humanité a fait des progrès. Avant, c'était au marché des esclaves qu’on trouvait de la main d’œuvre. Mais, tout de même, aujourd’hui encore, on considère toujours la travailleuse et le travailleur potentiels comme une marchandise, même quand on est écolo. Le langage mercantile néo-libéral est entré dans tous les esprits.
Ça tombe bien en cette saison de fêtes ! Édiles Écolos, offrez une travailleuse, voilée, ça porte bonheur, à vos administrés.
LA MEUTE.
Le lynchage, quel bonheur ! se sentir tout à coup plein d’affinités avec un tas de gens qu’on ne connaît pas, mais tous bien décidés, comme nous, à ce que règne l’ordre, le respect de nos valeurs, que soit ramené à ce qu’il mérite l’immonde dont la rumeur publique nous affirme qu’il est un nuisible. C’est bon de partager la même vertueuse indignation avec des centaines, voire des milliers, si pas plus, d’outrés dans leurs convictions. On se sent moins seul et plein de certitudes.  C’est rassurant. Et l’autre, tout seul, là, qui hurle : « C’est pas moi!, c'est pas moi! »
— T’en foutrais du « c’est pas moi ! Tu vas voir ! »
C’est ce qui arrive à Depardieu.
Certes, la Justice semble avoir assez d’éléments pour le trainer au banc d’infamie. Le viol, la main au cul et autres privautés non consenties avec les femmes, ça ne se fait plus Gégé ! S’il fut un temps où un mâle risquait - ô injure suprême ! - D'être pris pour un pédé – tu te rends compte ?- s’il ne se conduisait pas comme un soudard, c’est fini, n-i, ni-ni !
Et en plus, quand on en remet une couche à la télé dans un numéro de beauf’ aviné, de nos jours ça n’arrange guère la popularité. Ça fait même plus rire. Si, si, Gégé, ça ne fait plus rire !
Quand j’étais dans le show d’pisse (c’était il y a longtemps, rassurez-vous, je ne recommencerai plus et puis il y a prescription) j’en ai connu de ces stars, hommes ou femmes (pas tou§s, heureusement) qui, ivres de leur petit moment de notoriété, se croyaient tout permis. Ils se fantasmaient une image, une identité à laquelle ils se devaient de ressembler, sous peine de déchoir, de ne pas être à la hauteur.  Ils se donnaient le spectacle d’un personnage qu’ils n’étaient pas, mais s’efforçaient d’être. Forts de leur gloriole nationale, voire plus, ils se pensaient au-dessus des règles ordinaires du petit peuple…
Mais, comme on disait dans les pages roses du Petit Larousse (ça existe encore ?) : sic transit gloria mundi.
Autrement dit, le casse-gueule finit toujours par rattraper l’acrobate qui se croit au-dessus des lois de la pesanteur.
Néanmoins, l’espèce d’hystérie collective qui vient de saisir l’espace médiatique et ses environs immédiats, me révulse autant que les actes dont Depardieu est accusé, mais pour lesquels il n’a toujours pas été jugé.
Lorsqu’il le sera, s’il est reconnu coupable, il subira une condamnation plus ou moins sévère et la « justice » s’en tiendra là.
Ça peut ne pas satisfaire l’un ou l’autre, mais ça vaut mieux que d'être mis en pièce par la foule au coin de la rue.
Il semblerait, toutes proportions gardées, qu’on soit en face d’une forme d’exécution publique avant jugement.
Mais, s’il y a bien une chose que le déchaînement anti-Depardieu ne parviendra pas à gommer, c’est son talent d’acteur.
Un acteur, par nature, est un grand menteur. C’est un métier ! et dans tous les métiers, il y a des plus doués que d’autres. Depardieu est un surdoué. Paradoxalement, l’acteur est un menteur qui montre la vérité. Ce n’est pas lui qui parle, qui bouge, qui gesticule, qui pleure, qui rit, qui se fâche, c’est un autre dont il usurpe l’identité. Rude affaire ! D’autant plus que ça marche ! on y croit. Qu’est-ce qu’on peut être cons, quand même ! Enfin, là, on le fait un peu exprès. Finalement, tout le monde, spectateur et acteur, est complice dans ce marché de dupes volontaires.
La seule différence avec les « politiques » c’est qu’une fois le numéro terminé, l’acteur§ enlève son faux nez rouge et salue. Le "politique", jamais.
Dans le cas de Depardieu, ce n’est pas à son avantage.
Celui qu’on voit au cinéma, n’est pas celui qui existe réellement, forcément. C’est un artefact.
La vindicte mélange allègrement les deux. C'est une erreur. Il faut, au contraire, bien les séparer.
Et puis, un peu de rationalité et de calme devrait éviter de censurer quelque chose qui, en soi, n’existe pas : une fiction. Depardieu et tous ses autres camarades comédien§s ne seront bientôt plus que des personnages en 3D, aussi vrais que les actuels en chair et en os, leurs précurseurs. - Chat, j'ai pété ! aura pillé leur jeu, sans la moindre compensation. C’est le progrès, non ?
Mais je m’égare un peu.
Jamais le comportement, aussi hideux soit-il, d’un artiste, d'un savant, d'un érudit, n’a empêché son œuvre d’exister en dehors de lui et d’entrer dans l’Histoire.
Le Marquis de Sade, le Divin, était un criminel. Et pourtant…
Céline était une ordure antisémite. Et pourtant…
Depardieu est un acteur impressionnant et je ne vois pas la nécessité de nous priver de la rediffusion des films où il apparaît. D’autant plus, d’autres l’ont dit avant moi, que c’est une punition collective qui emporte avec elle les autres acteurs, producteurs et réalisateurs.
Allez ! on termine sur une note optimiste :  pour ce qui est de sa personne, Depardieu peut toujours demander l’asile politique à son ami Poutine.
À VOS PÂTES !
Pastafarien§s n’oubliez pas que le 25 décembre, après la salutaire lecture d'Entre les lignes, un plaisir ne doit pas en cacher un autre, c'est la fête de Nouillel.
Que le Monstre en Spaghetti Volant, en cette circonstance, vous caresse de son appendice nouilleux.
Ramen.
 

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