semaine 27
Portrait de Thierry Robberecht
Allo, allo, quelle nouvelle

Le comptable

Le 29 novembre 2018

Le secrétaire d’Etat à la migration possède une solide formation de comptable. Quand 485 migrants pénètrent illégalement dans le pays,485 doivent impérativement en sortir. Que ces gens retournent à la guerre ou à la famine, il s’en fiche. La règle comptable veut que le total soit égal à zéro. Comme les factures qui entrent et qui sortent, zéro est le bon chiffre comptable. Quand 1654 migrants entrent et que seulement 385 sortent, il appelle d’urgence son chef de cabinet

- Il y a un trou de 1269 migrants. Où sont-ils ?

Le chef de cabinet ne sait pas.

_ Comment ? 1269 non belges vivent comme des Belges sur ce territoire, parmi nous, comme nous, et vous ignorez où ils sont ! C’est scandaleux !

- Vous avez raison, Monsieur le secrétaire d’état mais j’ignore où ils se trouvent

- Sortez de ce bureau, espèce d’incapable ! s’étrangle le secrétaire d’état, rouge de colère

Le chef de cabinet sort, dépité

Plus tard dans l’après-midi, il convoque le professeur d’ethnologie le plus célèbre de l’université la plus réputée du pays.

- 1269 non Belges ont envahi le territoire. C’est insupportable ! Ils s’accouplent peut-être avec des femmes belges. Comment les identifier ?

- A mon avis, il est impossible de les identifier physiquement. Le mieux reste encore de vérifier si leurs papiers sont en règle.

- Enfin ! Voilà une réponse satisfaisante, se réjouit le secrétaire d’état.

Il appelle le chef de la police qui se montre, lui aussi, complètement démuni.

- Il faudrait plus d’effectifs pour contrôler tout le monde d’autant que les migrants ont peut-être déjà des papiers en règle par mariage ou par adoption.

Comment ! Ils ont déjà contaminé la population ! Pourquoi les femmes belges ne résistent-elles pas aux étrangers ?  C’est un scandale !

Complètement perdu, le secrétaire d’état appelle le premier Ministre

Il lui explique son problème et propose une solution.

On pourrait implanter une puce électronique dans chaque citoyen qui déterminerait le pourcentage de belgitude pour chacun : 100 pourcents pour les vrais belges, moins pour les Belges d’origine étrangère et moins encore pour les enfants nés des couples mixtes. Qu’en pensez-vous ?

- Mmmh, objecte le premier ministre. Il faudrait l’accord des Belges et un vote au parlement pour obtenir cette autorisation. Je pense que beaucoup de Belges refuseront. Vous accepteriez l’implantation d’une puce électronique de belgitude, vous, Monsieur le secrétaire d’état ?

- Moi ? Certainement pas ! répond celui-ci, légèrement paniqué.

Resté seul, le secrétaire d’état ressent des bouffées d’angoisse. Où sont passés ces 1269 migrants ?

Pour tenter de dissiper son angoisse le secrétaire d’état descend dans la rue et exige que chaque passant lui montre son visage et ses papiers. Catastrophe ! Ils ont tous des papiers en règle et sont tous blonds avec des yeux bleus ! Les migrants se sont dilués dans la population. Le pays est déjà envahi mais personne ne s’en rend compte. ! Les femmes belges n’ont pas résisté.Dans son délire, il agresse une dizaine de passants et même quelques policiers parce que leurs cheveux sont invisibles sous la casquette.

Au sanatorium, le personnel infirmier sait que le secrétaire d’état aime passer du temps sur la terrasse à observer les vieux chênes qui l’apaisent. Voilà enfin de vrais Belges qui sont nés et qui vivent sur le territoire depuis presque cent ans. C’est si bon d’observer les chênes, si reposant et apaisant sauf quand le vent se lève et qu’il apporte avec lui des glands d’arbres inconnus qui franchissent allègrement et sans honte les clôtures pourtant électrifiées du sanatorium. Même s’il est à la retraite forcée, le secrétaire d’état poursuit inlassablement son travail en courant derrière les glands étrangers qui volent dans le parc du sanatorium. Mais une fois à terre, comment distinguer les bons des mauvais ?

Image: 

© Serge Goldwicht

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