semaine 20

Israël : l’horreur coloniale

Zooms curieux par Gabrielle Lefèvre, le 24 novembre 2023

Les enfants, premières victimes des bombardements criminels de l'armée israélienne. Photo © UNICEF. UNI463724/El Baba

Ce qui se déroule sous nos yeux à Gaza n’est pas une guerre entre Israël et le Hamas mais bien une étape de plus dans la guerre menée par Israël contre la Palestine, contre tous les Palestiniens, qu’ils soient à Gaza, en Cisjordanie, dans des camps de réfugiés, à Jérusalem, au Liban, en Jordanie…

Membre de la direction du journal progressiste israélien Haaretz, le journaliste Gidéon Lévy, annonce le pire en Cisjordanie. (1) Il dénonce : « Les colons font partie des ennemis d’Israël en Cisjordanie, et l’armée israélienne ne fait rien pour les arrêter. Ses soldats participent activement aux pogroms, abusant honteusement des résidents – les photographiant et les humiliant, les tuant et les arrêtant, détruisant les mémoriaux, comme celui de Yasser Arafat à Tulkarm, et arrachant des milliers de personnes à leur lit. Tout cela jette de l’huile sur le feu et fait monter la tension.

Des soldats revanchards, envieux de leurs compatriotes de Gaza, se déchaînent dans les territoires occupés, le doigt léger et enthousiaste sur la gâchette. Près de 200 Palestiniens y ont été tués depuis le début de la guerre, et personne ne les arrête. »

Pour un Etat de Palestine

L’actuel échange des otages révèle au monde entier la politique d’emprisonnement de milliers de civils, poursuivie par Israël depuis des décennies, non seulement pour faire régner la terreur dans la population palestinienne mais aussi pour priver ce peuple de leaders capables d’incarner une autorité étatique. Le cas le plus célèbre est celui de Marwan Barghouti, parfois appelé le « Mandela palestinien », emprisonné depuis 21 ans. Nombre de Palestiniens, y compris dans la diaspora, sont parfaitement aptes à prendre la relève de l’Autorité palestinienne muselée et contrôlée par Israël et de créer les structures d’un véritable Etat palestinien que les pays européens pourraient reconnaître, ainsi que vient de le faire le Premier ministre espagnol Pedro Sanchez et que le souhaite le parti socialiste belge. Personne ne s’étonne de la réaction du MR qui s’y oppose fermement, préférant soutenir l’extrême-droite israélienne qui, pourtant, est accusée de crimes contre l’humanité à Gaza.

« Israël devra payer la facture, quoi qu’il arrive. », avertit Gidéon Levy. Et ce sera sanglant…

Sauf si la diplomatie triomphe enfin et que les timides tentatives d’instaurer un cessez-le-feu aboutissent à une véritable solution politique sous l’égide des Nations Unies.

C’est ce que souhaite la toute grande majorité des Etats du monde, sauf les Etats-Unis ainsi que plusieurs pays européens et autres qui leur sont inféodés.

Colonialisme de peuplement

Pour approfondir les notions de colonialisme, d’anticolonialisme et de colonialisme de peuplement, le Centre Tricontinental a publié un de ses « Alternatives Sud » où l’on peut lire l’analyse écrite par Areej Sabbagh-Khoury, professeure de sociologie et d’anthropologie à l’Université hébraïque de Jérusalem. (2) Elle démontre que le colonialisme de peuplement a été le moteur de la construction de l’État d’Israël.

D’ailleurs, écrit-elle, « dès sa création, le mouvement sioniste a utilisé la terminologie de la colonisation, envisageant l’établissement permanent et la création d’une société de colons comme un objectif central de l’action collective. » (…) « Le projet sioniste impliquait la relocalisation d’un groupe de colons d’Europe vers un territoire déjà peuplé, l’accumulation de terres et de propriétés locales et la marginalisation de autochtones. » Il s’agit d’« un processus violent auquel les travailleur.euses palestinien.nes en grande partie paysan.nes, ont résisté, ce qui a généré d’autres violences. »

Pour perpétuer cette colonisation, le nouvel Etat d’Israël a imposé un régime militaire à la population palestinienne qui n’avait pas été chassée lors de la Nakba, empêchant ainsi toute velléité de retour des centaines de milliers de Palestiniens expulsés de leur territoire ancestral. Les Palestiniens restant en territoire israélien sont devenus des citoyens de seconde zone et ceux des territoires occupés illégalement sont soumis à l’arbitraire militaire et au terrorisme des colons qui volent progressivement les terres les plus fertiles ainsi que les ressources en eau.

La lutte du peuple palestinien est donc aussi une lutte décoloniale, soutenue par d’autres pays du monde qui ont été confrontés au même type de colonialisme ravageur. Voilà pourquoi le drame vécu par le peuple palestinien est central pour l’avenir d’un monde basé sur le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, le droit à l’autodétermination, essentiels dans l’architecture des Nations Unies. Un droit que, bien évidemment, rechignent à reconnaître des puissances néo-coloniales comme les Etats-Unis et même l’Europe, soutiens inconditionnels d’Israël.

Les réparations du colonialisme

Pourtant, les réparations du colonialisme sont possibles, ainsi que le démontrent les négociations menées aux Nations Unies pour les descendants des colonisés africains.

Ainsi, le 27 et le 30 octobre 2023, la 40e et la 41e réunions et la 42e et la 43e réunions de la Troisième commission (Questions sociales, humanitaires et culturelles) de la 78e session de l’Assemblée générale des Nations Unies se sont déroulées à New York au cours desquelles les demandes de réparations pour la colonisation et la justice réparatrice pour les personnes d’ascendance africaine ont figuré parmi les sujets au centre du débat. On y a aussi évoqué les souffrances infligées au peuple palestinien.

Le mouvement international « Colonialism reparation » s’en réjouit, mais le chemin risque encore d’être long avant que, espère-t-il, les « nations colonisatrices condamnent leur passé colonial en le reconnaissant comme crime contre l’humanité en même temps qu’elles se réconcilient avec leur passé en présentant leurs excuses aux nations colonisées, puis les dédommagent pour les injustices commises en permettant une amélioration des conditions économiques et sociales. » (3)

1. https://investigaction.net/la-prochaine-mauvaise-surprise-disrael-viendra-de-cisjordanie/

2. - « Anticolonialisme(s). Points du vue du Sud. Alternatives Sud. Ed. Centre Tricontinental. Ed. Syllepse. 2023. www.cetri.be

3. https://www.pressenza.com/fr/2023/11/reparations-progres-aux-nations-unies/

 

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